Le jardin de Balata : le plus beau parc botanique des petites Antilles

On connait l’image d’Épinal de la Martinique avec ses immenses plages de sable blanc que viennent lécher les eaux turquoises de la Mer des Caraïbes ou de l’océan Atlantique. On connait le rhum martiniquais, cet exquis nectar de canne à sucre qui enivre délicieusement les papilles une fois fermenté puis distillé. On connait le terrible volcan de la montagne pelée, celui-là même qui cracha des torrents de feu au siècle dernier, brûlant et asphyxiant les 30.000 habitants de Saint-Pierre la malheureuse. La Martinique, c’est aussi ces fantastiques marchés aux épices présentés sur des madras tendus et aussi colorés que les vieilles maisons coloniales encore debout d’où nous parvient, lorsque l’on tend une oreille indiscrète, une douce musique créole portée par une langue qui respire le soleil tropical. Mais ce qui m’a le plus frappée lorsque j’ai foulé cette terre de France du bout du monde, c’est sa flore si exceptionnelle qu’elle a inspiré les Indiens Arawaks (son premier peuple) qui l’ont baptisée « Madinina », l’île aux fleurs. Alors pour le rendez-vous « voyageons ludique » initié par ma copi-net Souris Maman  dont le thème du mois tourne autour des iles, j’ai eu envie de vous emmener à l’intérieur des terres de Martinique, au Jardin de Balata situé tout près de Fort-de-France. Cet Eden luxuriant avec ses infatigables colibris et ses centaines de variétés de plantes du monde et de fleurs tropicales promet une belle promenade en pleine nature.

A environ 10 km de Fort-de-France, au bord de la très pittoresque route de la Trace qui traverse la forêt tropicale, le Jardin de Balata abrite depuis 30 ans une extraordinaire collection de plus de 3.000 espèces de plantes tropicales.

Ce jardin merveilleux est né de la patience d’un horticulteur-paysagiste grand voyageur, Jean-Philippe Thoze.  Ce passionné de botanique et collectionneur de plantes ramenées au gré de ses périples tombe amoureux de la propriété de feue sa grand-mère lorsqu’on lui demande de la défricher. Il la rachète, rénove la petite maison en bois coiffée d’un toit en pagode et transforme progressivement les trois hectares de jungle exubérante en jardin paysagé tropical. Au fil des ans, le projet prend de l’ampleur et il fait de son modeste jardin une œuvre d’art à l’immense patrimoine floral grâce à des espèces rapportées de toutes les régions tropicales du monde, tandis qu’il meuble la maison à l’antillaise avec  des objets d’époque.

Le jardin a été façonné sur un espace vallonné qui offre au visiteur une succession de perspectives variées, le surprenant par de nouvelles découvertes d’essences tropicales mises en scène simplement dans un parcours poétique, pédagogique et ressourçant.

Sur la terrasse qui donne accès au jardin, on est fasciné par la valse des colibris qui vont et viennent à toute allure pour siroter le nectar sucré des petits abreuvoirs suspendus aux poutres de la maison. On ne se lasse pas du spectacle qu’offrent ces raffinés oiseaux-mouche à bec de faucille et au plumage d’un bleu irréel, capables de voler sur place et même en marche arrière !

Et puis on lève les yeux vers le jardin et le regard se perd sur la majestueuse allée de palmiers avant de s’embraser sur la palette des chatoyantes couleurs qu’offrent les allées bordées de fleurs tropicales comme les hibiscus, les nymphéas exotiques, les broméliacées d’Amérique du Sud, les roses de porcelaine, les héliconias, les orchidées sauvages, les pandanus panachés, les balisiers ou alors les arbres fruitiers tels que les papayers, goyaviers et manguiers.

On s’étonne devant des raretés botaniques comme ce figuier étrangleur qui a enfermé dans ses racines un cocotier ou bien ce Dandrocalamus, plus grand bambou du monde. On s’attarde devant les espèces locales comme le fromager majestueux, les bananiers ou bien les fougères géantes.

Clou du spectacle, on s’émerveille devant la marre japonaise, ce bassin rafraichissant où jacinthes d’eau et lotus foisonnent parmi une myriade de poissons à l’ombre de palmiers royaux.

Enfin, on grimpe sur les ponts suspendus à quinze mètres au-dessus du sol pour trotter d’arbres en arbres à la cime du jardin et on admire un panorama imprenable sur les  frondaisons des palmiers et au-delà, sur l’immensité de la verte forêt tropicale, sur la baie de Fort-de-France et sur les pitons du Carbet.

Ce jardin de Balata, c’est une immersion dans la Martinique verte au cœur d’une atmosphère humide et haute en couleurs, bien loin de la sécheresse des paysage du sud de l’île. On y fait le plein de chlorophylle, on s’émerveille devant toute cette flore insulaire que l’on ne retrouvera pas en métropole. On regrette peut-être le côté sauvage des grands parcs naturels car ici tout respire le peaufinage réalisé par de petites mains humaines et le travail bien fait mais la poésie est au rendez-vous et on ressort de ce jardin apaisant avec des images et des odeurs plein la tête.