Nos belles vacances estivales en terres italiennes sont terminées. Cette année, nous découvert le nord de la Sardaigne pour bronzer sur ses sublimes plages aux eaux cristallines, dévaliser les boutiques de créateurs arpenter ses belles terres sauvages, infiltrer les repères de la jet-set pénétrer sa civilisation vieille de plusieurs millénaires et nous goinfrer de Malloreddus rencontrer son peuple si généreux. Pour partir, nous avions le choix entre l’avion et le bateau. Dans un bref moment d’égarement, nous avons répudié notre moyen de transport favori pour tenter l’aventure en ferry.
Ben oui, l’avion ne peut toujours pas transporter de voiture, accessoire pourtant salutaire pour qui veut s’imprégner de l’esprit sarde plutôt que vivre reclus comme un misanthrope. Au véhicule de location, on a préféré le confort du notre et la sécurité du siège bébé de Lutin. L’autre problème de l’avion vient de ses horaires de rotations amputant aux extrêmes nos précieuses vacances. Enfin, mini globe-trotter navigue encore gratuitement alors qu’il doit s’alléger de quelques billets pour avoir le privilège de poser son noble fessier sur le fauteuil d’un avion. Nous avons donc choisi de descendre à Gênes pour ensuite naviguer de nuit vers le port sarde d’Olbia.
Acte 1 / Une tragédie la veille du départ
Alors que je me réjouissais d’embarquer mes titanesques escarpins top glamours de 10 cm de haut et une pile de bouquins à faire pâlir d’envie les détenteurs de liseuses électroniques grâce au confort d’un coffre de voiture plus généreux qu’une soute à bagage d’avion, l’horizon s’est brusquement assombri la veille du départ. Un moment de grande solitude quand je réalise que les organisateurs du Tour de France ont précisément choisi NOTRE jour de départ en vacances pour faire partir leurs cyclistes de Modane, tout près du tunnel de Fréjus, la porte d’entrée de l’Italie ! Moi la voyageuse modèle toujours à l’heure, la Tour Operator à l’organisation infaillible quand on part en Italie, la tendue du string qui n’oublie jamais passeports, billets, itinéraires et cartes de crédits, la vacancière névrosée qui programme trois réveils la veille du départ pour éviter la panne d’oreiller, me voilà partie en croisade pour convaincre un Chéri Chéri amoureux de sa couette qu’il faudra lever l’ancre plus tôt que prévu si on ne veut pas que le bateau se carapate sans nous. Admirez ma force de persuasion : nous partirons le matin à 9h00 pour embarquer le soir à 21h30 avec une arrivée en Sardaigne prévue pour 9h00 le lendemain… Le tour du cadran quoi !
Acte 2 / Un périple routier surréaliste quand Lutin s’en mêle
Lutin n’ayant pas l’habitude des longs trajets en voiture, j’avoue qu’à quelques jours du départ, j’appréhendais un peu, beaucoup, affreusement cet interminable voyage ! Imaginez donc mon désespoir lorsque, dix minutes après le départ, nous entendons la phrase fatidique tant redoutée par tous les propriétaires de jeunes lutins : « on est bientôt arrivés ? ça fait TRES longtemps qu’on est dans la voiture ». Effarouchée par le nombre de décibels que Lutin est capable d’envoyer quand sa brève patience est mise à l’épreuve, j’avais évidemment prévu un tas d’activités nouvelles ou déjà approuvées par la cible : l’increvable Doudou, des livres jouets (électroniques, à lacer et en tissus), un CD d’histoires contées, des CD de musique avec ou sans livres associés, de petites gourmandises (ou l’art de solutionner simultanément l’estomac et l’ennui) et le joker nommé i-pad pour les cas désespérés. Les emmerdeurs organisateurs du Tour de France s’invitant sur notre route des vacances, pendant que Chéri Chéri pestiférait au volant de la voiture immobilisée dans un bouchon, Lutin s’est diverti en observant la caravane du tour, un vrai défilé alimentaire entre saucissons géants et madeleines colossales, un immense Mickey planqué derrière son journal ou encore de grosses cocottes à vélo… Bref tout un tas de bizarreries sur roues qui ont ravi un loulou heureux de constater que la route accueillait occasionnellement des hôtes un peu zinzins. Pourtant ce que Lutin a préféré contre toute attente, ce sont les innombrables péages autoroutiers. Je ne comprends décidément pas la charité excentrique de cet enfant qui sautille de joie à chaque passage en caisse.
Passés ces quelques bouchons, nous roulons sans encombres… Au rythme des musiques de Lutin. Au grand damne de mon mélomane de mari qui s’est vu confisquer sa playlist, Lutin a réquisitionné l’autoradio pour souiller nos tympans partager ses joyeuses compilations de comptines. Il écoute en boucle voue une tendresse toute particulière à la série Eveil musical des livres et CD de comptines parus chez Didier Jeunesse. Le problème c’est que ces ritournelles parasitent durablement notre cerveau. Je vous laisse imaginer la mine dépitée d’un Chéri Chéri peu habitué à la bibliothèque musicale de Lutin lorsque sa délicate oreille a subi à maintes reprises (quand le lutin aime, c’est toujours sans modération) la compilation fétiche de sa progéniture : les comptines de la ferme.
Je me réjouis d’ailleurs de partager avec vous l’une de ces musiques enchanteresses qui vous permettront d’apprécier notre sens du dévouement.
La frontière franchie, nous décidons de libérer nos oreilles au prétexte d’une pause déjeuner bienvenue. Une étape autoroutière gastronomique du seul point de vue de mon petit archéologue ravi d’y avoir déniché un téléphone à pièces et de jouer avec ce vestige abandonné. Un déjeuner écœurant plus loin, Lutin s’endort et nous voilà repartis sur une autoroute quasi-déserte. Et Chéri Chéri, le sourire sournois, de me demander triomphalement où sont passés tous ces Italiens sensés embouteiller la chaussée en cette journée de grands départs en vacances. Perplexe, je consulte la carte routière et m’aperçois que l’autoroute que nous empruntons n’est pas celle des estivants Milanais, ceux-là même qui saturent le trafic. Alors, on roule vite, très vite et à 16h00, nous sommes arrivés… 5 heures et demi avant le départ du bateau… Voilà, voilà, voilà…
Acte 3 / Une belle surprise en attendant le bateau
Merveilleux, plus de cinq heures à poiroter musarder au gré de nos envies… C’est là, alors que mes deux hommes me regardent avec ces yeux pleins de « on fait quoi maintenant ??? » qu’une l’idée de génie change mon statut de relou en celui de Tour Operator extraordinaire : visitons l’aquarium de Gênes ! Car non seulement c’est l’un des plus grands et des plus réputés d’Europe mais en plus il n’est pas trop loin de l’embarcadère des ferries et regorge de parkings à proximité. Voilà de quoi redonner la pêche à mes deux fans de faune aquatique.
C’est donc le portefeuille allégé de quelques 48 euros que nous nous réjouissons de ce moment de détente inopiné. Un aquarium agréable, pas trop peuplé, des enclos magnifiques, des espèces de toute beauté, des jeux d’ombres et de lumières, des espaces pour les enfants… Quelle différence avec le modeste aquarium de Lyon (ici) ! Juste pour le plaisir, voici quelques clichés figeant à jamais ces brefs instants de grâce…
Contents de pouvoir récompenser la patience de notre mini globe-trotter super top depuis le départ, nous pensions voir des étoiles dans ses yeux. Certes ces yeux ont brillé mais pas de cette façon là. Alors qu’il pouvait enfin courir, sauter, regarder les petits poissons, caresser les raies, s’amuser dans les espaces enfants, Lutin a commencé à dévoiler son côté obscur en milieu de promenade aquatique. Et il en avait des exigences notre apprenti dictateur en larmes entre les « je veux manger tout de suite et puis j’ai soif », les « c’est looong, j’en ai marre de la promenade, je veux aller tout de suite dans le bateau », les « je boude parce que je suis tombé », les « non, je veux pas être sur la photo » ou les « je suis fatigué mais je ne veux pas la poussette, bras, bras, BRAAAAAS ! ». Bref, ce fameux plan B qui aurait dû être le meilleur moment de la journée s’est transformé en une visite terminée au pas de course, souillée des lamentations sans fin.
Mais sitôt sorti le l’aquarium, Lutin est redevenu calme et souriant, comme si de rien n’était. Convoqués au port deux heures avant le départ du ferry, la suite du programme n’était pourtant guère réjouissante. Un dernier verre sur le port de plaisance et nous voilà parqués sur un immense quai, grains de sable perdus au milieu de centaines de voitures garées en rangs d’oignons. A croire que mon diablotin apprécie cette attente interminable. Certes, il s’est promené entre les voitures à l’arrêt, observant de son regard intense tous les passagers rencontrés sur le chemin et m’assaillant de questions : « Pourquoi le monsieur a les bras et la tête tout marron ? Pourquoi le bébé fait le caprice ? Pourquoi tu dis que le gros bateau n’est pas beau ? Pourquoi, pourquoi, POURQUOI ??? ». Il a aussi tenté quelques cabrioles devant notre cargo, s’est un peu traîné dans des recoins pas très nets, a collé quelques stickers sur son livre et a fini devant ses dessins animés favoris mais il a fait preuve d’une bonne humeur incroyable… D’autant que nous finissons par embarquer de façon chaotique une heure après l’heure prévue du départ !
Acte 4 / Lutin navigue sur les flots
22h30, nous sommes enfin à bord du ferry de croisière nocturne de la compagnie italienne Tirrenia. Je quitte le hangar à voiture une valise cabine dans une main, un sac sur le dos, doudou et mon sac à main calés sous un bras et Lutin dans l’autre bras pendant que Chéri Chéri vérifie encore et encore que la voiture ne risque rien, vraiment rien malgré la valse des véhicules voisins. Nous foulons vite les moquettes défraichies du bateau, direction l’accueil pour récupérer la carte-clé de notre cabine. Le précieux sésame en poche (parce que figurez-vous le bateau affiche complet), nous pénétrons dans notre cabine. Cool, un hublot sur la mer (ok, on voit rien, il fait nuit), génial des lits superposés aux draps propres (euh sans barrière de lit, c’est juste la loose), pratique le mini bureau, ouf un mini placard équipé de toilettes-douche-lavabo. Ceci dit, Lutin a quand même trouvé le moyen de rentrer dans cette micro salle de bain pendant que j’y faisais pipi… Sans doute la force de l’habitude.
Pas le temps de rêvasser. Vue l’heure, il est plus que temps d’aller manger. Quoi ??? Le restaurant est déjà fermé et la cafétéria a été dévalisée… Mais sérieusement ils servent à quoi ces restaurants parce que là, on est encore à quai et on vient juste de se poser ! La nourriture est fade, huileuse mais mon petit estomac sur pattes n’y trouve de nouveau rien à redire : ses nuggets sont « très très bons miam ! ». C’est au dessert que je sens le bateau quitter le quai et moi défaillir par la même occasion. La mer est agitée ce soir, ça tangue de tous les côtés et je n’ai définitivement plus faim.
Nous regagnons tant bien que mal notre cabine, exécutant en chemin une curieuse chorégraphie rythmée par les vaguelettes. Nous traversons les salons et le pont, squattés par des vacanciers couchés sous les tables, par terre dans des duvets ou juste enroulés dans une serviette de plage pour tenter de juguler l’effet banquise de la climatisation. Et mini globe-trotter de remarquer haut et fort « Regarde il y a plein de clochards. Moi j’aime mieux mon lit de la cabine ». Oui, oui, oui… Cet enfant est spontané. Mais je n’ai pas le temps de répliquer. Déambulant avec la grâce des lamantins observés quelques heures plus tôt, je sens que je ne vais pas tarder à virer au vert.
A peine arrivée, j’absorbe immédiatement mes petits cachets contre le mal des transports. Je n’oublie pas Lutin qui avale la dose maximale de sirop anti-nausée. Le pharmacien m’avait donné le choix entre les bracelets d’acupuncture à l’efficacité douteuse, l’homéopathie très légère et le bon sirop anesthésiant. Entre une pile électrique et un lutin amorphe prêt pour le dodo, pensez bien que le choix n’a pas été difficile ! On l’a pourtant contrarié notre petit cascadeur quand on a posé directement son matelas sur la moquette de la cabine, entre nos deux couchettes pour éviter les chutes. Mais miracle de la médecine oblige, les protestations n’ont pas duré longtemps. D’ailleurs moi aussi je m’endors rapidement, plongée dans un curieux rêve de laine et de moutons…
Le ferry était silencieux. On a donc bien mais peu dormi, réveillés en fanfare une heure et demie avant l’arrivée du bateau par des emmerdeuses hôtesses nous invitant à prendre le petit-déjeuner. Malgré ces appels agressifs, je refuse de lâcher mon oreiller. Ronchon je suis et resterai encore quelques heures, shootée par mes petites pilules magiques. Mais Lutin dont seule la tête subsiste encore sur le matelas (le reste du corps ayant dérivé sous ma couchette) retrouve rapidement du poil de la bête, motivé par un Chéri Chéri pressé de boire son espresso servi dans un dé à coudre. Malgré une heure de retard au départ, nous sommes arrivés à l’heure à destination. Débarqués sous un franc soleil, nous gagnerons en trois quart d’heure notre hôtel sur la Costa Smeralda pour de nouvelles aventures… Les vacances peuvent commencer !
Pssst, un dernier mot… Si c’était à refaire, nous referions tout pareil parce qu’au final, malgré un embarquement un peu trop chaotique (à l’aller seulement), le voyage s’est bien déroulé et le ferry est quand même sacrément pratique !
sourismaman a écrit
quel voyage 🙂 et bien voilà un souvenir de plus, tu nous montres bientôt la sardaigne j’espère? c’est pour éviter pleurs, braillements etc…que j’ai pris l’avion et je ne regrette pas car avec un en prime qui a le mal des transports ça aurait été l’enfer 🙂 bises
Lucie-Rose a écrit
Oui l’avion reste une valeur sûre. D’ailleurs depuis Paris, le périple en ferry aurait été certainement trop long pour Loulou 🙂 Ceci dit, ça se fait finalement bien depuis Lyon et on a été agréablement surpris par le côté pratique du ferry qui nous a permis de profiter de deux vraies journées de vacances le premier et le dernier jour. Loulou et moi sommes sujets au mal des transports mais les médicaments changent vraiment tout ! Bon on a encore pas inventé de médocs anti-braillements, je te l’accorde… Bises
Maman Clémentine a écrit
J’aime tes récits, j’aime ton style et je suis une méchante copi-net mais qu’est ce que j’ai ri. 🙂 Hâte de connaître la suite.
PS : L’aquarium a l’air sublime.
Lucie-Rose a écrit
Oh merci du compliment méchante copi-net 🙂 Pour la suite, face A j’ai envie de sérieusement faire découvrir la Sardaigne qui le mérite bien… Face B, promis je parlerai de Lutin en vacances, tout un poème !!!